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Retour au Bercail

Mon premier est synonyme de refuge ou maison. Mon second est un lieu qui prend soin de nos estomacs. Mon tout est un endroit un peu secret, une adresse que j’ai du mal à garder pour moi tant elle a tout bon. Dans la petite rue pavée du centre historique de Rennes se trouve depuis plus de trois ans un petit restaurant répondant au doux nom de Bercail. Tout y est fait avec beaucoup d’amour et de patience, du jardin à l’assiette. Oui, du jardin. Parce que depuis peu ils passent aussi beaucoup de temps dans leur potager, au sud de Rennes. Sans pour autant oublier les producteurs avec lesquels ils ont entamé cette aventure. Bref, ces deux-là, ils ont tout compris.


Crédit photos © : Ventre Archives



Sibylle et Grégoire roulé leur bosse, voyagé, travaillé pour plusieurs grandes adresses, à Paris et dans le Périgord notamment, avant de se décider à venir s’installer en Bretagne. Pourquoi la Bretagne ? “On avait envie d’un territoire où trouver à la fois de très bons produits de la mer mais aussi des produits maraîchers d’exception” m’expliquent-ils, “la Bretagne nous paraissait être un bon compromis”. La première est parisienne, le second est normand. C’est derrière les fourneaux de Ferrandi qu’ils se sont rencontrés.



C’est chez Frenchie, à Paris, que le déclic s’est fait”, raconte Sibylle, “J’ai compris qu’on pouvait travailler dans une chouette ambiance, avec une belle éthique de travail, sans pour autant sacrifier les produits. Ça a été une révélation. On s’est dit qu’on pouvait faire pareil, voire mieux, mais pas à Paris”.



Aujourd’hui, la cuisine de Sibylle et Grégoire est ultra-locale, fraîche et aboutie. J’ai eu la chance de goûter à leurs petits plats, il y a deux ans, et j’ai encore un souvenir ému de leur petit bouillon d’étrilles ainsi que d’une entrée à base de tomates anciennes - dingues - et d’eau de tomate infusée au shiso. C’est aussi chez eux que j’ai découvert pour la première fois - en dessert ! - les mini-concombres dont on a envie de ne faire qu’une bouchée.



C’est main dans la main avec les producteurs du coin que ces deux-là travaillent depuis leurs débuts, pour la plupart installés en Ille-et-Vilaine : leurs oeufs viennent du Gaec Marqué à Landujan, leurs poissons d’un certain mareyeur installé à Loctudy dans le Finistère, leur fromage de la fromagerie Maliguen, leur cochon de la ferme du Pradenn à Melesse, leurs huîtres du Vivier-sur-mer, leurs légumes de plusieurs maraîchers bretons, comme Emile des Jardins de Pesnel ou la famille Bocel, à Pacé. “Quand on est arrivés ici, on ne connaissait personne. On est donc partis d’une feuille blanche. Notre sourcing a donc été très net. On habitait à Saint-Malo à l’époque, avant de s’installer à Rennes. On faisait la tournée des producteurs du coin, on arrêtait plus. On connaissait déjà Emile Biardeau, à Pesnel, dans le Morbihan, on avait trop envie de bosser avec lui parce qu’il se lançait en même temps que nous, la même année” explique Sibylle. “Et puis c’est quand même un luxe de commencer à travailler avec un maraîcher qui te demande ce dont tu as besoin !” renchérit Grégoire.



On comprend pourquoi Paris ne faisait pas partie du plan, quand ils ont décidé de se lancer. “A Paris, tu ne les vois quasiment jamais tes producteurs, en fait. Et nous on ne voulait pas de ça”, me raconte Grégoire. “Ici, on les voit toutes les semaines, même si on ne leur achète rien, on va leur faire un bisou et des blagues”.



Depuis leur ouverture, le restaurant a connu plusieurs vies, au gré des envies de Sibylle et Grégoire, mais aussi à cause des confinements. Bercail a ainsi décidé d’aller plus loin côté sourcing. Aujourd’hui, ils mettent sur pied un potager, à quelques encablures au sud de Rennes, qui leur permettra d’approvisionner le restaurant en fruits, légumes et fleurs, mais aussi en œufs car ils y terminent l’installation d’un poulailler. “Après le premier confinement, notre capacité d’accueil était limitée à 14 personnes par service, on s’est dit que ce n’était pas intéressant pour nous, on a décidé de n’ouvrir que le soir. Ce temps libre, on l’a utilisé pour imaginer et réaliser notre potager”.



Mais ce n’est pas tout. Les deux sont insatiables. “Cela fait deux ans qu’on a jamais eu le même menu, d’une semaine à une autre, ou d’une année à une autre”, m’explique Grégoire. “Et même, jamais le même format !” renchérit Sibylle. “On s’est toujours dit qu’on devait amener un truc en plus. Si les gens reviennent après chez nous, on ne veut pas qu’ils vivent exactement la même expérience”. Lorsque je leur demande si cette envie d’expérimenter provient plutôt d’une propension personnelle à explorer ou bien plutôt d’une nécessaire prise en compte du contexte ambiant, les deux me répondent : “un peu des deux !”, mais on se rend bien compte que, mesures sanitaires ou pas, ils auraient de toute façon trouvé un moyen de contourner la routine.



D’ailleurs, pendant le second confinement, pour s’adapter aux conditions de la vente à emporter, Sibylle et Grégoire n’ont pas hésité à transformer leur restaurant en kiosque à raviolis. Au menu ce jour-là quand je viens les rencontrer : guo tie, des raviolis grillés chinois au porc bio de la ferme du Pradenn, avec du gingembre et du céleri. Mais aussi des ravioles aux oeufs frais à la ricotta et pickles de cédrat des Agrumes Bachès, ou encore cette petite brioche vapeur, ou bao, au boudin noir de porc bio maison et chutney aux pommes.Tout est fait à la main, bien sûr, avec de la farine qu’ils moulent eux-mêmes.



Si preuve il fallait de leur insatiable envie d’explorer, Sibylle et Grégoire ont ouvert Pénates, début 2020 avec deux autres associé.e.s du monde de la restauration, Caroline et Pierre, un petit bistrot situé un peu plus bas dans le centre de Rennes, non loin des berges de la Vilaine, à environ 5 min à pied de Bercail. Le début d’une vie de quartier, finalement.












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